«O Exército do Crime» era como os nazis chamavam ao grupo de resistentes franceses liderados por Missak (Michel) Manouchian no berrante cartaz vermelho celebrizado pelos versos de Aragon e a música de Léo Ferré.
Rien n'est précaire comme vivre Rien comme être n'est passager C'est un peu fondre comme le givre Et pour le vent être léger J'arrive où je suis étranger
Un jour tu passes la frontière D'où viens-tu mais où vas-tu donc Demain qu'importe et qu'importe hier Le coeur change avec le chardon Tout est sans rime ni pardon
Passe ton doigt là sur ta tempe Touche l'enfance de tes yeux Mieux vaut laisser basses les lampes La nuit plus longtemps nous va mieux C'est le grand jour qui se fait vieux
Les arbres sont beaux en automne Mais l'enfant qu'est-il devenu Je me regarde et je m'étonne De ce voyageur inconnu De son visage et ses pieds nus
Peu a peu tu te fais silence Mais pas assez vite pourtant Pour ne sentir ta dissemblance Et sur le toi-même d'antan Tomber la poussière du temps
C'est long vieillir au bout du compte Le sable en fuit entre nos doigts C'est comme une eau froide qui monte C'est comme une honte qui croît Un cuir à crier qu'on corroie
C'est long d'être un homme une chose C'est long de renoncer à tout Et sens-tu les métamorphoses Qui se font au-dedans de nous Lentement plier nos genoux
O mer amère ô mer profonde Quelle est l'heure de tes marées Combien faut-il d'années-secondes A l'homme pour l'homme abjurer Pourquoi pourquoi ces simagrées
Rien n'est précaire comme vivre Rien comme être n'est passager C'est un peu fondre comme le givre Et pour le vent être léger J'arrive où je suis étranger
Tout est affaire de décor Changer de lit changer de corps A quoi bon puisque c'est encore Moi qui moi-même me trahis Moi qui me traîne et m'éparpille Et mon ombre se déshabille Dans les bras semblables des filles Où j'ai cru trouver un pays.
Cœur léger cœur changeant cœur lourd Le temps de rêver est bien court Que faut-il faire de mes jours Que faut-il faire de mes nuits Je n'avais amour ni demeure Nulle part où je vive ou meure Je passais comme la rumeur Je m'endormais comme le bruit.
Est-ce ainsi que les hommes vivent Et leurs baisers au loin les suivent.
C'était un temps déraisonnable On avait mis les morts à table On faisait des châteaux de sable On prenait les loups pour des chiens Tout changeait de pôle et d'épaule La pièce était-elle ou non drôle Moi si j'y tenais mal mon rôle C'était de n'y comprendre rien
Dans le quartier Hohenzollern Entre la Sarre et les casernes Comme les fleurs de la luzerne Fleurissaient les seins de Lola Elle avait un cœur d'hirondelle Sur le canapé du bordel Je venais m'allonger près d'elle Dans les hoquets du pianola.
Est-ce ainsi que les hommes vivent Et leurs baisers au loin les suivent.
Le ciel était gris de nuages Il y volait des oies sauvages Qui criaient la mort au passage Au-dessus des maisons des quais Je les voyais par la fenêtre Leur chant triste entrait dans mon être Et je croyais y reconnaître Du Rainer Maria Rilke.
Elle était brune elle était blanche Ses cheveux tombaient sur ses hanches Et la semaine et le dimanche Elle ouvrait à tous ses bras nus Elle avait des yeux de faïence Elle travaillait avec vaillance Pour un artilleur de Mayence Qui n'en est jamais revenu.
Est-ce ainsi que les hommes vivent Et leurs baisers au loin les suivent.
Il est d'autres soldats en ville Et la nuit montent les civils Remets du rimmel à tes cils Lola qui t'en iras bientôt Encore un verre de liqueur Ce fut en avril à cinq heures Au petit jour que dans ton cœur Un dragon plongea son couteau
Est-ce ainsi que les hommes vivent Et leurs baisers au loin les suivent.
Tu n'en reviendras pas toi qui courais les filles Jeune homme dont j'ai vu battre le cœur à nu Quand j'ai déchiré ta chemise et toi non plus Tu n'en reviendras pas vieux joueur de manille
Qu'un obus a coupé par le travers en deux Pour une fois qu'il avait un jeu du tonnerre Et toi le tatoué l'ancien légionnaire Tu survivras longtemps sans visage sans yeux
On part Dieu sait pour où ça tient du mauvais rêve On glissera le long de la ligne de feu Quelque part ça commence à n'être plus du jeu Les bonshommes là-bas attendent la relève
Roule au loin roule train des dernières lueurs Les soldats assoupis que ta danse secoue Laissent pencher leur front et fléchissent le cou Cela sent le tabac la laine et la sueur
Comment vous regarder sans voir vos destinées Fiancés de la terre et promis des douleurs La veilleuse vous fait de la couleur des pleurs Vous bougez vaguement vos jambes condamnées
Déjà la pierre pense où votre nom s'inscrit Déjà vous n'êtes plus qu'un mot d'or sur nos places Déjà le souvenir de vos amours s'efface Déjà vous n'êtes plus que pour avoir péri
Aimer à perdre la raison Aimer à n'en savoir que dire A n'avoir que toi d'horizon Et ne connaître de saisons Que par la douleur du partir Aimer à perdre la raison
Ah c'est toujours toi que l'on blesse C'est toujours ton miroir brisé Mon pauvre bonheur, ma faiblesse Toi qu'on insulte et qu'on délaisse Dans toute chair martyrisée
Aimer à perdre la raison Aimer à n'en savoir que dire A n'avoir que toi d'horizon Et ne connaître de saisons Que par la douleur du partir Aimer à perdre la raison
La faim, la fatigue et le froid Toutes les misères du monde C'est par mon amour que j'y crois En elle je porte ma croix Et de leurs nuits ma nuit se fonde
Aimer à perdre la raison Aimer à n'en savoir que dire A n'avoir que toi d'horizon Et ne connaître de saisons Que par la douleur du partir Aimer à perdre la raison
Tu portais dans ta voix comme un chant de Nerval Quand tu parlais du sang jeune homme singulier Scandant la cruauté de tes vers réguliers Le rire des bouchers t'escortait dans les Halles Tu avais en ces jours ces accents de gageure Que j'entends retentir à travers les années Poète de vingt ans d'avance assassiné Et que vengeaient déjà le blasphème et l'injure
Je pense à toi Desnos qui partis de Compiègne Comme un soir en dormant tu nous en fis récit Accomplir jusqu'au bout ta propre prophétie Là-bas où le destin de notre siècle saigne
Debout sous un porche avec un cornet de frites Te voilà par mauvais temps près de Saint-Merry Dévisageant le monde avec effronterie De ton regard pareil à celui d'Amphitrite Enorme et palpitant d'une pâle buée Et le sol à ton pied comme au sein nu l'écume Se couvre de mégots de crachats de légumes Dans les pas de la pluie et des prostituées
Je pense à toi Desnos qui partis de Compiègne Comme un soir en dormant tu nous en fis récit Accomplir jusqu'au bout ta propre prophétie Là-bas où le destin de notre siècle saigne
Et c'est encore toi sans fin qui te promènes Berger des longs désirs et des songes brisés Sous les arbres obscurs dans les Champs-Elysées Jusqu'à l'épuisement de la nuit ton domaine O la Gare de l'Est et le premier croissant Le café noir qu'on prend près du percolateur Les journaux frais les boulevards pleins de senteur Les bouches du métro qui captent les passants
Je pense à toi Desnos qui partis de Compiègne Comme un soir en dormant tu nous en fis récit Accomplir jusqu'au bout ta propre prophétie Là-bas où le destin de notre siècle saigne
La ville un peu partout garde de ton passage Une ombre de couleur à ses frontons salis Et quand le jour se lève au Sacré-Cœur pâli Quand sur le Panthéon comme un équarissage Le crépuscule met ses lambeaux écorchés Quand le vent hurle aux loups dessous le Pont-au-Change Quand le soleil au Bois roule avec les oranges Quand la lune s'assied de clocher en clocher
Je pense à toi Desnos qui partis de Compiègne Comme un soir en dormant tu nous en fis récit Accomplir jusqu'au bout ta propre prophétie Là-bas où le destin de notre siècle saigne
Suffit-il donc que tu paraisses De l'air que te fait rattachant Tes cheveux ce geste touchant Que je renaisse et reconnaisse Un monde habité par le chant Elsa mon amour ma jeunesse
O forte et douce comme un vin Pareille au soleil des fenêtres Tu me rends la caresse d'être Tu me rends la soif et la faim De vivre encore et de connaître Notre histoire jusqu'à la fin
C'est miracle que d'être ensemble Que la lumière sur ta joue Qu'autour de toi le vent se joue Toujours si je te vois je tremble Comme à son premier rendez-vous Un jeune homme qui me ressemble
Pour la première fois ta bouche Pour la première fois ta voix D'une aile à la cime des bois L'arbre frémit jusqu'à la souche C'est toujours la première fois Quand ta robe en passant me touche
Ma vie en vérité commence Le jour où je t'ai rencontrée Toi dont les bras ont su barrer Sa route atroce à ma démence Et qui m'as montré la contré Que la bonté seule ensemence
Tu vins au cœur du désarroi Pour chasser les mauvaises fièvres Et j'ai flambé comme un genièvre A la Noël entre tes doigts Je suis né vraiment de ta lèvre Ma vie est à partir de toi
Suffit-il donc que tu paraisses De l'air que te fait rattachant Tes cheveux ce geste touchant Que je renaisse et reconnaisse Un monde habité par le chant Elsa mon amour ma jeunesse